24 juin 2010

Abandon

Tiens, ça faisait longtemps que ça ne m'était pas arrivé: j'abandonne Galatea 2.2 de Richard Powers après 90 pages.  Trop ardu comme lecture, je n'ai pas la tête à cela en ce moment. Ce gars-là écrit avec un dictionnaire des synonymes à portée de la main, et pour chaque terme il choisit l'équivalent le plus obscur.  Cela m'a rappelé mes premiers essais de lecture en anglais (Agatha Christie, Gone with the Wind,...), où je buttais sur des mots à toutes les trois phrases. J'ai pour principe de ne pas interrompre ma lecture pour chercher des expressions dans le dictionnaire anglais-français, en autant que je saisisse le sens général du passage.  Mais là ce n'est pas possible!  Lorsque dans une seule page j'ai relevé syllogistic, segues, et synesthesias, sans compter nombre de phrases alambiquées, je me suis avouée vaincue.

Le sujet était pourtant intéressant. À la suite d'une rupture, un écrivain accepte l'invitation de son alma mater pour un poste de professeur invité au département de littérature anglaise (on ne sait pas trop pourquoi, il ne donne aucun cours, il est censé travaillé sur son prochain roman mais il a un blocage). Il lie connaissance avec des chercheurs du centre de recherche sur le cerveau et l'intelligence artificielle, notamment  un neurologiste bourru et antipathique qui lui demande de l'aider à gagner un pari. À eux deux, ils ont neuf mois pour construire un robot capable de comprendre les grandes oeuvres de la littérature et d'en faire une analyse cohérente.

Vu le titre, et connaissant un peu le mythe de Pygmalion et Galatée, je devine ce qui va se passer...  Si les personnages avaient été très sympathiques, j'aurais pu décider de m'accrocher malgré le style hermétique, mais là, non, décidément je n'accroche pas. Il faut dire aussi que j'ai lu il n'y a pas si longtemps un autre roman, Thinks... , qui se déroule dans un milieu semblable, mais l'écriture de David Lodge, pourtant pas simpliste, est nettement plus agréable!

Je n'abandonne pas complètement cet auteur car il avait été chaudement recommandé par plusieurs participants du défi de lecture Blog-o-trésors pour le roman Le Temps où nous chantions. Mais le prochain essai se fera en version française!

Galatea 2.2 de Richard Powers, HarperCollins, 1995. 329 p. Non traduit, à ma connaissance.

15 juin 2010

On jase...

Pour toutes celles, nombreuses selon ce que me dit mon calculateur de statistiques Sitemeter, que Google amène ici grâce à une recherche du style «gabaldon echo in the bone en français», sachez que le livre tant attendu paraîtra le 16 septembre en Europe (pas trouvé de date pour le Québec...) et s'intitulera L'Écho des coeurs lointains. Mais maintenant que vous êtes ici, profitez-en donc pour visiter mon blogue et, pourquoi pas, me laisser un petit mot!

D'autres nouvelles gabaldonesques: Une bande dessinée paraîtra fin septembre, sous le titre de The Exile: An Outlander Graphic Novel. D'après ce que j'ai lu sur le site de l'écrivaine, l'intrigue sera centrée autour du personnage de Murtaugh Fraser (pourtant en page couverture on peut lire «Experience Jamie's side of the story»... Serait-ce pour des raisons commerciales?  Jamie étant selon moi le personnage le plus populaire de la série...).  Il est aussi question d'un film, mais rien encore de concret.  Selon vous, qui pourrait jouer l'Écossais imaginaire le plus sexy au monde?  Toute la question est là...

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Qui a dit que la bienveillance entre parfaits inconnus n'existait plus?  Cet après-midi je suis allé à la bibliothèque municipale me procurer le tome 2 de la bande dessinées De Capes et de Crocs.  Voyant mon dépit de ne pas le trouver sur l'étagère, le jeune homme qui l'avait dans les mains me l'a offert et a insisté pour que je le prenne, disant qu'il l'emprunterait une prochaine fois. Ça a fait ma journée, non seulement parce que j'avais hâte de le lire mais surtout parce que c'était un acte de gentillesse complètement gratuit!

13 juin 2010

Un Ange cornu avec des ailes de tôle

Une parfaite continuation de ma lecture précédente, puisque dans ce recueil de récits autobiographiques, Michel Tremblay nous raconte sa découverte des livres, de la littérature et de l'écriture. Il nous parle des romans qui ont marqué son enfance et son adolescence, de la Comtesse de Ségur à Saint-Exupéry, pour finir avec la parution de sa première oeuvre.

J'ai adoré ce petit recueil qui se dévore en quelques heures, et ce pour deux raisons. Premièrement, on apprend plein de choses sur cet auteur si important de notre littérature. Comment il découvrit le plaisir de raconter, d'être écouté, en inventant une suite à Blanche-Neige et les sept nains et en la contant à ses petits voisins sous forme de roman-feuilleton quotidien. Comment Eschyle et le théâtre grec influenceront éventuellement sa propre écriture, notamment par l'utilisation du choeur.  Comment Gabrielle Roy lui fit prendre conscience qu'on pouvait situer une histoire à Montréal, de notre temps, avec des personnages ordinaires et avec notre parler, et créer un chef-d'oeuvre.

Deuxièmement, ces récits tour à tour drôles et touchants ont résonné profondément dans mon coeur de lectrice, m'ont rappelé plein de souvenirs, comme par exemple le jour où j'ai eu droit, enfin, d'entrer à l'étage des adultes de la bibliothèque municipale et d'y emprunter des livres.  Quelle fierté, quelle réjouissance de voir ces immenses étagères qui me semblaient presque infinies! Pourtant la bibliothèque de ma ville n'était pas bien grande, mais comparativement à l'étage des enfants, coincé dans une pièce minuscule au sous-sol, c'était le paradis!  Comme je n'avais que treize ans, ma mère avait dû signer le bas de ma carte pour que j'aie le droit de prendre des livres dans la section des romans policiers; ne m'intéressant qu'à Arsène Lupin et à Agatha Christie, je ne comprenais pas trop la raison de cette précaution...  Ce n'est que quelques années plus tard que je découvris San-Antonio!


Les billets de Catherine du Biblioblog, de Papillon, de Yueyin.

Un Ange cornu avec des ailes de tôle de Michel Tremblay, Actes Sud/Leméac, 1994; collection Babel pour l'édition de poche illustrée ci-dessus, 1996, 285 p.

11 juin 2010

La Bibliothèque la nuit

Encore une fois, Alberto Manguel, dont l'érudition n'a d'égale que son talent de vulgarisateur, nous fait partager son amour des livres et des maisons qui les hébergent, de l'antique bibliothèque d'Alexandrie à sa propre bibliothèque dans une ancienne grange poitevine.

Si les chapitres sur les différentes méthodes de catalogage des livres m'ont intéressée d'un point de vue intellectuel, je ne me suis pas sentie concernée personnellement, car je suis peu attachée aux livres en tant qu'objets de collection. La plupart des bouquins, même ceux que  j'ai beaucoup aimés, ne font pas long feu chez moi, à moins que je pense les relire (c'est rare) ou avoir à m'y référer lors d'autres lectures.  Cette attitude est peut-être due à toute une vie de fréquentation des bibliothèques municipales et scolaires comme source principale d'approvisionnement...

En fait, j'adorerais avoir une pièce remplie de livres et aménagée pour la lecture, mais ce serait plus pour son ambiance que pour y entreposer les livres déjà lus. D'ailleurs, idéalement les étagères contiendraient presque exclusivement les livres que j'ai envie de lire, et se renouvelleraient au fur et à mesure!

J'ai été plus touchée par les chapitres sur la relation entre les humains et les livres. Certains passages sont amusants, comme celui (à la fois drôle et poignant) racontant cette expérience vécue il y a une vingtaine d'années par des bibliothécaires colombiens se promenant à dos d'âne pour prêter des livres aux paysans dans les contrées les plus reculées (en comparaison, le bibliobus de Jacques Poulin, c'est le grand luxe!). Les livres devaient être rendus après un prêt de trois semaines, en échange d'un nouveau lot.
«Je n'ai connu qu'une occasion où un livre n'a pas été retourné, m'a-t-elle raconté. Nous avions pris, en plus des habituels titres pratiques, une traduction en espagnol de L'Iliade. Quand le moment est venu de l'échanger, les paysans ont refusé de le rendre.  Nous avons décidé de leur en faire cadeau, mais nous leur avons demandé pourquoi ils voulaient garder ce titre-là en particulier. Il nous ont expliqué que le récit d'Homère reflète exactement leur histoire: il y est question d'une contrée déchirée par la guerre, où des dieux fous et capricieux décident du sort d'êtres humains qui ne savent jamais très bien pourquoi on se bat ni quand ils seront tués.»
Émouvant aussi, le cas des prisonniers des camps de concentration se passant en douce quelques livres cachés (H.G.Wells, Thomas Mann), prisonniers pour qui la lecture était à la fois un réconfort et un acte de résistance.

Le récit des autodafés commis par les nazis m'a fait grincer des dents, tout comme celui du pillage de la bibliothèque de Bagdad (qui contenait des manuscrits anciens d'une valeur inestimable) par la population profitant du chaos causé par l'invasion américaine.  Mais la pire perte pour l'humanité est peut-être la destruction systématique des bibliothèques et des archives mayas et aztèques par les envahisseurs espagnols, vouant ces cultures à un oubli presque total.

Sur un mode plus léger, j'ai apprécié aussi le chapitre concernant les bibliothèques imaginaires et les livres qu'elles contiennent, fantasmés mais jamais écrits.  Rabelais, dans son fameux Pantagruel, avait imaginé un catalogue long de cinq pages, comprenant des titres aussi folichons que La Bedondaine des Présidens ou encore Apologie d'iceluy contre ceux qui disent que la mule du pape ne mange qu'à ses heures.  Dickens s'était prêté au jeu également, allant même jusqu'à créer de faux volumes sur lesquels étaient inscrits les titres les plus farfelus: Guide du sommeil réparateur (tomes I à XIX), Catalogue des statues célébrant le Duc de Wellington en dix volumes, etc.

Un essai captivant, donc, autant par ce qu'on y apprend que par les réflexions qu'il engendre. Nous, Occidentaux choyés, ne prenons-nous pas la lecture pour acquise, la considérant comme un passe-temps (un passe-temps qui nous passionne, certes, mais on trouve aussi des passionnés de danse sociale, de patin à roulettes...)?  En d'autres temps, en d'autres lieux, elle fut et reste un acte de rébellion contre la tyrannie, contre l'oubli.


Les billets de Louis, de Bellesahi, de Florinette, de Chimère...


La Bibliothèque la nuit d'Alberto Manguel, traduit de l'anglais, Actes Sud/Leméac, 2006, 335 p. Titre de la version originale: The Library at Night.

07 juin 2010

Deux bandes dessinées

Je l'avoue, point de vue bandes dessinées j'étais un peu restée à l'âge de pierre: Achille Talon, Snoopy, Les Bidochon, Rubrique-à-brac...  Le seul truc un peu plus récent auquel j'avais accroché c'était Dilbert, ce comic strip américain sur les aléas du monde du travail.  Puis l'an passé, poussée par de nombreux billets élogieux, j'ai découvert avec un immense plaisir la série des Paul de Michel Rabagliati. Cela m'a encouragée à élargir mes horizons, et lors de mon dernier arrêt à la bibliothèque, j'ai emprunté les premiers tomes de deux séries que j'avais remarquées ici et là sur la blogosphère (mais où? Rogntudju, je n'arrive pas à m'en souvenir!)

De Cape et de crocs
Un dessin absolument magnifique, des couleurs vibrantes à dominantes bleues et orangées; une atmosphère de roman d'Alexandre Dumas, avec clins d'oeil à Cyrano, Molière, La Fontaine; et ces deux gentilshommes -- ou plutôt gentilsanimaux, puisque Don Lope de Villalobos Y Sangrin est un loup et son ami Armand Raynal de Maupertuis un renard -- à la fois drôles et romantiques à souhait; sans oublier un petit lapin absolument craquant du nom d'Eusèbe:  j'ai tout aimé de cette BD absolument parfaite! Le tome 1 finit sur un cliffhanger incroyable, ça me prend la suite au plus vite!


Magasin général
Dans un style plus réservé, toute en teintes de terre convenant fort bien au sujet, cette BD est un peu un téléroman mis en image, mais alors un téléroman bien réussi, avec un excellent équilibre entre l'humour et l'émotion.  Ça se déroule dans les années vingt, dans un petit village du Québec.  Les personnages sont attachants, pas trop stéréotypés, et les deux dessinateurs/scénaristes français ont eu l'excellente initiative de demander la collaboration d'un auteur québécois pour les dialogues, qui sonnent fort juste!

De Cape et de crocs, Acte 1: Le secret du Janissaire, d'Ayroles et Masbou,  Delcourt, 1995, 46 p.
Magasin général, tome 1: Marie, de Loisel et Tripp, Casterman, 2006, 80 p.

03 juin 2010

Moi aussi!

«Vieux ou neufs, le seul signe dont j'essaie toujours de débarrasser mes livres (en général sans grand succès) est l'indication de prix que leur fixent au dos des libraires malveillants.  Ces affreuses écailles blanches sont difficiles à arracher, elles laissent des cicatrices lépreuses et des taches de glu auxquelles adhèrent la poussière et la bourre des âges, et je rêve d'un enfer collant spécial auquel serait condamné l'inventeur de ces adhésifs.»
Alberto Manguel, La Bibliothèque la nuit.

01 juin 2010

Novecento: pianiste

Se lisant comme une nouvelle, Novecento: pianiste est en fait une pièce de théâtre écrite pour un seul acteur, un monologue.  Ceux qui me lisent depuis un certain temps ont pu le constater, je ne suis pas forte sur les nouvelles, mais j'ai néanmoins bien apprécié celle-ci.  Peut-être parce qu'elle se présente toute seule et non en un recueil? Mais surtout grâce à la belle plume d'Alessandro Baricco, toujours aussi fantaisiste. L'idée de départ est formidable (né sur un transatlantique, orphelin recueilli par l'équipage, Novecento n'est jamais descendu à terre) et fort bien exploitée, avec beaucoup d'humour, de poésie et l'omniprésence de la mer et de la musique.  Seule la fin m'a un peu déçue, me semblant tomber à plat.  Mais dans l'ensemble, une lecture charmante.

Le billet d'Allie, celui de Catherine du Biblioblog.

Novecento: pianiste d'Alessandro Baricco, traduit de l'italien, publié chez Mille et une nuits en 1997. 77 p. Titre original: Novecento. Un monologo (1994).